Tourisme de masse, dérèglement climatique, conservation des œuvres... Réunis le temps d'une conférence, les patrons du Louvre, du château de Versailles, du Prado et de l'Ermitage tentent de répondre aux principales menaces qui pèsent sur leurs établissements. Et les défis sont nombreux.
Comment léguer Parmigianino, Vélasquez ou Cézanne à l'éternité? La question agite depuis longtemps les conservateurs et était au centre d'un G7 des institutions culturelles qui s'est tenu le 12 octobre au Vatican. L'objectif, rapporte The Art newspaper, était de comprendre comment les grands musées font face aux défis qui pèsent sur leurs inestimables collections. Parmi eux, les dangers liés au climat et le tourisme de masse sont les plus urgents. Sept dirigeants des plus grands musées du monde ont été conviés par Barbara Jatta, la directrice des musées du Vatican.
Parmi les invités, on retrouvait Laurent Salomé qui dirige le château de Versailles, Jean-Luc Martinez du Louvre, Mikhaïl Piotrovski du musée de l'Ermitage à Saint-Pétersbourg, Gabriele Finaldi de la National Gallery de Londres, Miguel Falomir Faus à la tête du musée du Prado madrilène, Timothy Potts du J. Paul Getty Museum de Los Angeles, and Christian Greco du musée Egizio de Turin. Pour mesurer l'ampleur de leur tâche, l'historien de l'art Salvatore Settis a rappelé en ouverture que la conservation préventive s'inscrit dans une dynamique plus générale, liée à «la récente notion philosophique et juridique du droit des générations futures».
Cette grand-messe se tenait dans la galerie des antiques Braccio Nuovo du musée Chiaramonti, aménagée par Antonio Canova au début du XIXe siècle. L'événement organisé dans la cité papale marquait les dix ans des travaux qui ont permis à la chapelle Sixtine de recevoir à présent six millions de visiteurs par an.
C'est sans doute le musée du Louvre qui a à relever le défi le plus lourd: 8.500 mètres carrés sont menacés par la montée du niveau de la Seine. Une crue, comme de 1910, menacerait les collections et notamment les réserves du musée. Le Louvre a décidé de construire un centre de réserves de 20.000 mètres carrés à Liévin près du Louvre-Lens, qui sera achevé en 2019.
Le tourisme de masse
Le tourisme de masse, le second volet principal de la réunion, est un phénomène qui n'est pas moins aisé à gérer. En 2017, le musée du Louvre a connu une forte hausse de sa fréquentation et accueilli plus de 8 millions de visiteurs. Un chiffre démesuré permis par la mise en place depuis trois ans de billets horodatés. La National Gallery, avec 6 millions de visiteurs, ou l'Ermitage avec 4 millions d'entrées par an, font, eux aussi, partie des dix musées les plus fréquentés de la planète. Rallongements des heures d'ouverture, créations d'extensions... Il n'y a pas de solution magique pour gérer ces afflux, qui dépassent bien souvent les limites maximales des fréquentations indiquées selon l'espace disponible.
«On ne doit pas sacraliser l'œuvre originale.», a affirmé Christian Greco qui dirige le musée Egizio de Turin, qui expose 6500 antiquités de l'Égypte ancienne. Il est convaincu de l'opportunité que peuvent offrir les nouvelles technologies. Un propos qui peut se comprendre concernant des artefacts, mais probablement moins pour des sculptures et des peintures.
Une discussion très existentielle se tissait en toile de fond de cette réunion au sommet. Les sept conservateurs se sont interrogés sur la mission même de leurs prestigieuses institutions. Et, à l'optimisme général, Laurent Salomé a répondu: «La conservation ne peut pas être absolue». «La détérioration fait même partie de la poésie de Versailles», a-t-il renchéri. L'ancien patron des musées de Rennes et de Rouen a aussi pointé du doigt le sort des petits musées de province et des églises esseulées, en France comme partout dans le monde.
La vigilance est de mise, comme le rappelle l'actualité marquée par les inondations à Venise. Lundi, un drame s'est déroulé au Palais Zaguri: deux toiles de Joan Miró ont été retrouvées immergées dans l'eau quasiment jusqu'à mi-hauteur.
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